Les Etats-Unis vont-ils être forcés de quitter le Liban suite à leurs menaces contre Nabih Berri, le Président du Parlement ?

Elijah J. Magnier:

 Le journal émirati, “The National” – citant des sources au courant des projets étasuniens -annonce que les États-Unis envisagent de sanctionner le Président chiite du Parlement libanais, Nabih Berri, ainsi que plusieurs de ses soutiens financiers. Selon des sources proches du Président du Parlement, “une telle mesure – si elle est sérieuse et pas seulement une menace en l’air – conduira au renvoi de toutes les forces américaines du Liban, en particulier de celles qui sont intégrées à l’armée libanaise et à d’autres forces de sécurité, ou qui les entraînent. Le Parlement libanais appliquera officiellement la même mesure à l’encontre de toutes les organisations liées au gouvernement étasunien, en représailles contre les décisions agressives de l’establishment étasunien”. 

D’après les sources, “le Président Nabih Berri ne jouit pas seulement du soutien du mouvement AMAL et de celui du Hezbollah et de leurs députés et ministres respectifs, mais il est aussi soutenu par la majorité des députés libanais. Ils le réélisent depuis des décennies. Par conséquent, toute mesure des Etats-Unis contre le Président du Parlement, ou les partisans d’AMAL au Liban ou en Afrique ou n’importe où dans le monde, nuisant indirectement à Berri engendrera les mêmes représailles libanaises contre la présence étasunienne dans le pays. Berri a beaucoupd’amis musulmans, parmi les Présidents des Parlements des pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) et des pays africains musulmans, qui sont prêts à le soutenir contre l’establishment étasunien. La réaction sera certainement plus sévère et plus ostensible que la condamnation purement formelle des États arabes lors de l’annexion par Israël du plateau du Golan et de Jérusalem “. 

“Berri est une figure emblématique des chiites au Liban, bien connue des personnalités, diplomates et politiciens européens, étasuniens et arabes. En prenant des mesures contre le Président du Parlement, l’establishment étasunien s’expose à une loi parlementaire qui ouvrira le pays à l’Iran et la Russie qui veulent engager une collaboration avec le Liban dans les domaines militaire, du renseignement et de la sécurité, et établir des bases militaires dans le pays. Les seules institutions étasuniennes qui pourraient alors se maintenir dans le pays seraient l’ambassade et l’université et rien d’autre”, a déclaré la source, pour montrer que le Président du parlement était bien décidé à riposter énergiquement contre n’importe quelle mesure étasunienne le concernant, lui ou ses proches. 

Une telle mesure conduirait les Etats-Unis à fomenter le désordre et l’instabilité politiques au Liban pendant des années. Mais le président libanais Michel Aoun est allé encore plus loin que Berri en soutenant le Hezbollah.

Il est vrai que le Président du Parlement a dit à son invité, le Secrétaire d’Etat étasunien Mike Pompeo, en visite au Liban le mois dernier, qu'”il (Berri) est le père de la résistance et l’initiateur de la résistance contre Israël”. Mais, le président Aoun s’est, quant à lui, rendu à Moscou pour conclure un accord militaire avec la Russie, il a exprimé son plein appui au projet russe de voir tous les réfugiés syriens retourner en Syrie, etIl a déclaré à Pompéo qu’il soutenait pleinement la Résistance (Hezbollah). Et pour finir, Aoun a accueilli on ne peut plus chaleureusement le ministre vénézuélien des Affaires étrangères Jorge Arreaza au palais présidentiel de Baabda, au grand déplaisir de l’establishment américain, actuellement engagé dans une campagne hystérique de changement de régime contre le Président Maduro. 

En fait, lors de sa récente visite au Liban, Pompéo n’a pas trouvé un seul parti politique, même parmi ses plus proches alliés libanais, qui soit prêt à s’opposer au Hezbollah. Qui plus est, aucun des dirigeants des forces de sécurité libanaises rencontrés par Pompéo au Liban n’est prêt à se lever contre le Hezbollah qui fait désormais partie de l’appareil législatif, exécutif et sécuritaire du pays. 

Si la menace étasunienne contre Berri est sérieuse, alors il faut croire que l’establishment américain a décidé de se tirer une balle dans le pied et de mettre fin à sa présence au Levant. Dans cette partie du monde, les États-Unis ne sont pas bien vus. En Syrie, ils sont considérés comme une force d’occupation. En Irak, les Irakiens sont divisés entre ceux qui sont impatients de voir le dernier soldat étasunien quitter le pays et ceux qui veulent maintenir une collaboration militaire régulée et limitée avec les Etats-Unis. De plus, les récents “cadeaux” offerts par le Président Trump au Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou – à savoir Jérusalem et le plateau du Golan – leur ont aliéné la population arabe et les Palestiniens qui ne veulent plus des Etats-Unis comme médiateur dans quelques pourparlers de paix que ce soit. 

Oui, il y a des membres du mouvement AMAL – le groupe de Berri – qui ont la citoyenneté étasunienne et qui ont de bonnes relations avec certains responsables américains ; ces membres essaient actuellement d’améliorer la situation.Pendant ce temps, le Président a préparé quelques mesures graduelles à mettre en œuvre, au moment opportun, contre la présence étasunienne au Liban, au cas où Washington appliquerait sa menace ; on ne saura lesquelles que si la menace se concrétise.

Mais jusqu’à présent, aucun officiel étasunien n’a confirmé les intentions de Washington à l’égard du Président du Parlement libanais. Berri s’est récemment rendu en Irak, où il a rencontré de hauts responsables et des chefs religieux dirigés par le Grand Ayatollah Sayyed Ali Sistani, montrant l’étendue de ses contacts et de ses relations. Par sa visite en Irak, le Président du Parlement libanais a voulu signifier aux Etats-Unis qu’il est le leader d’un groupe chiite qui dépasse le Liban et que les États-Unis feraient bien de réfléchir avant d’envoyer des messages menaçants qu’ils n’ont pas l’intention de mettre en pratique. Et si les menaces sont sérieuses, alors les Etats-Unis doivent se préparer aux conséquences. La balle – d’après notresource – est maintenant dans le camp de Trump.

 Traduction : Dominique Muselet

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