
Par Elijah J. Magnier
En science politique, un État failli est défini comme un État qui n’est plus en mesure d’assurer la sécurité, la justice ou les services de base à ses citoyens, ni de conserver le monopole de la violence légitime sur son territoire. Lorsque l’envoyé spécial américain Thomas Barrack a qualifié le Liban d’« État failli », il ne se contentait pas de constater un effondrement : il traçait une ligne politique. Peut-on réellement définir le Liban comme un État failli alors que Barrack continue de rencontrer ses ministres, ses commandants militaires et ses diplomates, en leur demandant d’entreprendre des actions qui submergeraient même un gouvernement fragile – un État encore meurtri par la guerre, l’effondrement économique et les bombardements incessants d’Israël ? Quelles sont les véritables intentions de Barrack derrière cette définition ?
À première vue, sa déclaration semble refléter la misère du Liban. L’économie s’est effondrée, la monnaie a perdu plus de 95 % de sa valeur, l’électricité se fait rare et les citoyens dépendent de générateurs privés et de camions-citernes. La capacité de l’État à fournir éducation, santé et protection sociale a été vidée de sa substance. Pour Washington, ce portrait correspond à la définition académique d’un État failli. Pourtant, le Liban conserve des ministères fonctionnels, une armée reconnue, un parlement élu, un système judiciaire et un réseau diplomatique. Ce n’est ni la Somalie des années 1990, ni le Yémen en guerre totale. L’étiquette d’« État failli » simplifie à l’excès : elle efface la différence entre l’effondrement et la contrainte – entre un État qui ne peut pas agir et un État à qui l’on ne permet pas d’agir.
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