La réunion Russie – Turquie et Iran en Syrie: un chemin politico-militaire pour terminer la guerre de Syrie

 

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  • Ankara va frapper le terrorisme plus durement et empêcher la guerre de Syrie de se reprendre

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En: https://ejmagnier.com/2016/12/21/the-russian-turkish-iranian-meeting-on-syria-a-politico-military-road-to-end-the-syrian-war …

 

Elijah J. Magnier: @EjmAlrai

 

Traduit par le Prof. Olivier dulac.

Les ministres des affaires étrangères de Russie, de la Turquie et d’Iran se sont réunis à Moscou afin de se mettre d’accord sur une feuille de route pour la Syrie en 2017. Les trois principaux acteurs sur le terrain en Syrie font un plan pour terminer la guerre, en excluant les Etats-Unis et l’Europe. Moscou, Ankara et Téhéran contrôlent la plupart (mais pas tous) les belligérants au sol, ces combattants qui occupent la plus grande partie de la Syrie.

La réunion de Moscou a eu lieu la veille de l’assassinat de l’ambassadeur de Russie à Ankara, Andrei Karlov, qui a reçu plusieurs balles tirées par un officier de l’équipe de protection turque, Mevlut Mert Altıntas. L’assassinat a été qualifié par Ankara et Moscou de tentative pour créer une animosité entre les deux pays.

Ce que Altıntas, cet officier turc de 22 ans, a dit après avoir fait feu sur l’ambassadeur montre qu’il fait partie d’une organisation idéologique. Ses mots n’étaient pas seulement l’expression d’une revanche pour Alep en Syrie. Quelques instants après son acte, il a dit : “Nous ferons allégeance à Mohammed pour le djihad tant que nous restons en vie”.

Cette phrase est une citation du livre de référence Islamique écrit par Sahih Bukhari. Dans ce “Livre du djihad,” la “porte d’incitation au combat” 2679 il dit “Le Messager d’Allah, que la paix soit sur lui, va pour superviser la tranchée (al-Khandaq)”. Il a vu les Muhajereen (immigrés venus faire le djihad) et Ansar (locaux) creusant une tranchée eux-mêmes parce qu’ils n’avaient pas d’esclaves travaillant pour eux. Quand il vit à quel point ils étaient épuisés et affamés , il a dit: “Oh Allah, la seule vie est celle de l’au-delà, alors pardonne aux Ansar et aux Muhajera.” Iles répondirent : Nous ferons allégeance à Mohammed pour le djihad tant que nous restons en vie”.

L’assassinat de l’ambassadeur de Russie a néanmoins renforcé la nécessité de combattre le terrorisme et ouvre de nouvelles questions : de nombreux pays réviseront les modalités de recrutement des agents de protection personnelle rapprochée. Cette nouvelle sélection méticuleuse augmentera le budget du contre-terrorisme.

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Cette attaque terroriste poussera plus que jamais Ankara dans les bras de Moscou. Elle persuadera aussi la Turquie que combattre le terrorisme ne suffit pas, mais que des efforts supplémentaires doivent être faits pour terminer la guerre en Syrie afin de mettre fin à son impact négatif sur les pays voisins, en particulier la Turquie.

L’Iran et les Etats-Unis ont fermé leurs ambassades respectives à Ankara par “peur d’une possible attaque terroriste”. En outre, le vieux conflit entre Ankara et les Kurdes du PKK est plus omniprésent que jamais, et l’implication de troupes turques contre l’”Etat islamique”  (EI -ISIS – Daesh) en Syrie contribue à l’instabilité de la Turquie. Ces organisations ont une longue histoire d’attaques suicides au cours de l’année qui se termine.

Selon des sources bien informées, le but de la réunion des ministres des Affaires étrangères et de la Défense à Moscou était de générer une stratégie politico-militaire pour terminer la guerre en Syrie. La Russie possède un levier dans cette direction international au travers des Nations Unies ; l’Iran contrôle ses milices aussi bien que la Turquie et peut exercer une pression suffisante pour aboutir à une cessation générale des hostilités sur tout le territoire syrien, suivi par une issue politique d’ici la fin de 2017. Seule la région encore sous le contrôle d’ISIS demandera une intervention militaire pour que ce groupe cesse d’occuper Raqqah et ses environs ruraux.

La Turquie a décidé de participer à la libération du nord de la Syrie après une entente avec la Russie, malgré le fossé qui reste béant entre Damas et Ankara. Cette amertume persistante est surtout dûe au soutien donné par la Turquie aux djihadistes et à l’opposition syrienne dès le début de la guerre.

Mais les Syriens sont encore confrontés à une fragmentation : il y a ceux qui soutiennent le Président syrien Bashar al-Assad ; il y a ceux qui soutiennent les rebelles ; il y a ceux qui soutiennent al-Qaeda (Fatah al-Sham) ; il y a ceux qui soutiennent l’Etat Islamique (ISIS- EI) ; et il y a ceux qui ne soutiennent personne et demandent seulement la fin de la guerre.

La plupart des réfugiés syriens déplacés en Jordanie, au Liban et en Turquie ne soutiennent pas le Président Assad. Néanmoins, les réfugiés qui sont déplacés à l’intérieur du pays, à part à Idlib, représentent le plus grand nombre de civils syriens (avec ceux qui vivent dans les grandes villes sous le contrôle du régime syrien). Ils veulent voir la fin de la guerre et un pays stable protégé par une armée syrienne forte avec des institutions qui fonctionnent, quels que soient les dirigeants.

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Il est difficile de parler d’une vision politique qui serait partagée par tous ces gens et capable de les réunir sous un toit tant qu’il y a des groupes djihadistes qui rejettent le concept de démocratie et coexistent dans toutes les communautés, comme l’ont tant de fois déclaré les djihadistes.

La réunion de Moscou avait donc pour but d’en finir d’abord avec la situation militaire avant de parler d’une solution politique qui obtiendrait le meilleur consensus. Certains groupes parmi les rebelles auront sans doute besoin d’être évalués plus en détail quand il s’agira de freiner les djihadistes et les régions qu’ils contrôlent.

La fin de l’action militaire demandera un effort pour que les acteurs sur le terrain s’entendent. La Turquie a joué un rôle important en jouant l’équilibre entre certains groupes djihadistes (y compris des combattants étrangers venant du Levant pour promouvoir la guerre et bâtir l’Etat islamique) et l’opposition armée modérée qui accepte aujourd’hui plus que jamais de coexister avec des Syriens d’autres religions. Ils sont en effet prêts à changer leurs slogans sectaires et à entamer une réconciliation pour éviter la partition de la Syrie et préserver la structure de l’Etat.

Le rôle de la Russie et de l’Iran – selon cet accord – les porte garants au nom du gouvernement syrien pour ne faire usage de la force militaire que si toutes les tentatives politiques consensuelles ont échoué, et d’éviter d’initier de nouvelles batailles sous réserve d’un accord préalable. Toutes les parties sont d’accord pour attaquer ISIS, pour contenir sa présence, et débarrasser le territoire syrien de son contrôle.

De même que 2016 a été une mauvaise année pour ISIS en Irak, 2017 promet d’être la pire année pour ISIS en Syrie. Le Nouvel An apportera sans doute des éléments permettant d’espérer la fin de la guerre en Syrie.