
Par Elijah J. Magnier
Traduction : Daniel G.
Nichée dans le Caucase, la région du Haut-Karabakh est un symbole vivant de la géopolitique mondiale. Loin d’être un simple différend territorial entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, la région forme un nœud où se croisent les aspirations stratégiques de la Russie, de l’Iran, d’Israël, des USA et de la Turquie. La perte du Haut-Karabakh par l’Arménie s’inscrit dans un récit plus vaste qui englobe non seulement le territoire, mais un labyrinthe de voies stratégiques, d’alliances et de mouvements géopolitiques. Si certains considèrent que le conflit est basé sur l’ethnicité, d’autres y voient une lutte pour des corridors clés qui pourraient potentiellement séparer l’Iran de l’Arménie et renforcer l’influence de la Turquie en Eurasie. Les enjeux géopolitiques sont de taille : les aspirations de l’Arménie à joindre l’OTAN sont contestées par la Russie, l’Iran et la Turquie; les intérêts européens sont en jeu; et le rôle prépondérant d’Israël en Azerbaïdjan fait tiquer l’Iran. Alors que la Russie et la Turquie promeuvent des corridors qui pourraient marginaliser davantage l’Iran dans le Caucase du Sud, la recherche d’une paix durable entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan reste un défi, d’autant plus que les tensions actuelles servent les intérêts de plusieurs acteurs mondiaux.
Sous l’égide de la Russie, les responsables arméniens du Haut-Karabakh ont récemment signé un accord avec l’Azerbaïdjan qui reste à finaliser. Cet accord prévoit que les Arméniens deviendront une minorité intégrée dans la société azerbaïdjanaise, ce qui constitue un changement important à l’issue de la récente attaque de 24 heures. Après des années de conflit intense, Bakou affirme désormais sa domination sur la région contestée. Mais la crise sous-jacente entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est loin d’être résolue.
Le conflit du Haut-Karabakh, qui est fondé sur des différences ethniques et culturelles profondément ancrées, persiste depuis des décennies. Malgré les efforts de la communauté internationale qui n’arrive pas à trouver de solutions durables, les cessez-le-feu temporaires et la paix de courte durée cèdent inévitablement la place à une reprise des hostilités. La région contestée du Haut-Karabakh se trouve à l’intérieur des frontières de l’Azerbaïdjan et est au cœur du différend entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. En l’absence de ressources naturelles, les habitants de la région vivent principalement de l’agriculture. En 1988, les dirigeants du Karabakh ont commencé à prôner l’unification avec l’Arménie soviétique, ouvrant ainsi la voie à des tensions dans le Caucase du Sud.
La guerre a éclaté en 1993 et les séparatistes arméniens ont pris le contrôle de la région, qui s’étend sur plus de 4 800 kilomètres carrés. Les Arméniens forment 95 % de la population de la région, soit 150 000 personnes, à la suite du départ de plus de 700 000 résidents azerbaïdjanais après la prise de contrôle par les Arméniens. Ce déplacement massif a laissé une cicatrice durable dans le cœur de la communauté azerbaïdjanaise, une blessure que le temps n’a pas encore guérie.
Campagne militaire de l’Azerbaïdjan de 2020 : un tournant dans le conflit du Haut-Karabakh
En septembre 2020, l’Azerbaïdjan a lancé une offensive militaire de six semaines qui lui a permis de réaliser des avancées territoriales substantielles. Avec le soutien de la Turquie et d’Israël, les forces azerbaïdjanaises ont progressé jusqu’aux abords de la capitale régionale.
Cet effort militaire a permis à l’Azerbaïdjan de récupérer cinq régions autour du Karabakh. En novembre 2020, un accord négocié par la Russie a été conclu, qui autorisait les forces de maintien de la paix russes à rester dans la région pour une durée initiale de cinq ans. Ce mandat est renouvelable, sauf si l’une des parties principales s’oppose à sa prolongation.
Toutefois, l’accord a été critiqué dans la capitale arménienne, Erevan. De nombreux Arméniens y ont vu une capitulation, ce qui a conduit à de nombreux appels à la démission du premier ministre Nikol Pachinian. Ce dernier a toutefois obtenu un second mandat malgré la tourmente, bien qu’il se soit heurté à l’opposition farouche des nationalistes arméniens opposés à tout pacte avec l’Azerbaïdjan, ce qui fragilisait l’accord et le rendait susceptible d’être rompu dans un avenir prévisible.
Subscribe to get access
Read more of this content when you subscribe today.
You must be logged in to post a comment.