Le champ de bataille ukrainien donne naissance à un « nouvel ordre mondial »

Par Elijah J. Magnier

Traduction : Daniel G.

Toutes sortes de spéculations circulent à propos de la naissance d’un « nouvel ordre mondial » issu de la bataille que se livrent les USA et la Russie en Ukraine. Le Moyen-Orient, l’Asie et l’Afrique attendent de voir les résultats de cette bataille, ses implications et ce qui en ressortira pour former de nouvelles alliances une fois la poussière retombée. Un nouveau monde naîtra inévitablement après bien des vicissitudes ponctuées de guerres directes, d’occupations de pays, de guerres par procuration et de sanctions unilatérales illégales qui ont épuisé la population mondiale. À quoi ressemblera le « nouvel ordre mondial »? Sera-t-il meilleur ou pire que le monde actuel?

Si jamais un « nouvel ordre mondial » émerge, il devrait remettre en question l’ordre actuel que les USA font respecter depuis qu’ils ont pris le contrôle en 1990, lorsque le président soviétique Mikhaïl Gorbatchev a annoncé le début de la Perestroïka (qui signifie « reconstruction » en russe). L’ordre mondial et l’hégémonie unilatérale des États-Unis ont dominé jusqu’en septembre 2015, lorsque le président Vladimir Poutine a décidé de livrer bataille pour ramener la Russie sur la scène internationale pendant la guerre en Syrie en assurant une présence russe sur le champ de bataille. La Syrie n’était pas un champ de bataille ordinaire, mais un territoire où les États-Unis voulaient créer un État failli qui ferait en sorte que la Russie perde son accès à la Méditerranée qui lui procure sa base navale dans le port syrien de Tartous. 

Ce n’est pas une coïncidence que les États-Unis aient décidé de consolider leur position au Moyen-Orient avant que la Russie ne reprenne sa place dans le monde en créant une coalition avec des dizaines d’États occidentaux pour occuper l’Afghanistan, l’Irak et chasser le président Bachar al-Assad du pouvoir. Les objectifs américains ont imposé aux troupes de Moscou et de Washington d’être dangereusement près l’une de l’autre dans une zone géographique minuscule avec des buts contradictoires. Le fait que la Russie ait eu le dessus en offrant un soutien adéquat à Assad et en récupérant la majeure partie du « territoire utile » syrien a bouleversé les plans stratégiques antirusses des États-Unis. Les pays européens ont été et sont  encore une force secondaire dans les guerres américaines de domination et d’occupation de l’Afghanistan, de l’Irak et de la Syrie, sans qu’ils en retirent grand-chose.

L’Europe a connu de grandes civilisations anciennes (grecque, hellénistique et romaine). Les Portugais, les Espagnols, les Britanniques, les Austro-Hongrois et les Français ont créé des empires, ont conquis des parties considérables du monde et se sont emparés d’importantes richesses. Le continent européen a connu des centaines de guerres à travers les âges jusqu’à la Première Guerre mondiale, connue sous le nom de Grande Guerre de 1914. La Grande-Bretagne, la Russie, l’Italie, la Roumanie, le Canada, le Japon et les États-Unis (qui sont entrés en 1917, 6 mois avant sa fin) se sont battus contre l’Allemagne, l’Empire austro-hongrois, la Bulgarie et l’Empire ottoman. Quelques États européens et la Russie se sont retrouvés dans les tranchées (avec les États-Unis) contre alliance ennemie. La Grande-Bretagne a subi d’importantes pertes, soit 994 000 personnes, mais pas autant que la Russie, qui a perdu 3 millions et 3,3 millions de personnes. Le sang russe et européen s’est mélangé sur le sol du continent dans la lutte pour la liberté.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, la Russie a également subi le plus grand nombre de pertes (24 millions de militaires et de civils) et a combattu aux côtés de l’Europe, notamment de la Grande-Bretagne, contre l’Allemagne nazie. Les États-Unis sont entrés en guerre par la porte économique. En effet, le président Franklin Roosevelt a obtenu du Congrès le pouvoir exceptionnel que lui conférait la Loi prêt-bail plutôt que vendre des fournitures de guerre au prix qu’il jugeait approprié pour soutenir l’effort de guerre. Cinq ans après la fin de la guerre, l’Europe a remboursé les sommes prêtées jusqu’au dernier centime. Elle a mis fin aux paiements précédemment engagés entre 2006 et 2015. 

Depuis des décennies, les USA attendaient la bonne occasion de retourner sur le continent européen pour s’y établir. À l’époque, l’Europe représentait environ le tiers de la population mondiale. La Seconde Guerre mondiale a stimulé l’économie américaine chancelante, qui souffrait de la Grande Dépression causée par le krach boursier de 1929, en créant 17 millions d’emplois, ce qui a permis à l’économie américaine de passer de 88,6 milliards de dollars en 1939 à 135 milliards en 1944. La guerre a vraiment ouvert une possibilité croissance géopolitique et commerciale rentable pour l’économie américaine, une doctrine et une pratique que les États-Unis ont adoptées pendant plusieurs décennies après la Seconde Guerre mondiale. Cependant, les résultats de la guerre en Union soviétique étaient différents de ceux des USA. La Russie a perdu plus de 10 % de sa population, 70 % de ses installations industrielles et 50 % de ses bâtiments et de ses biens immobiliers.

Les États-Unis se sont retrouvés à coopérer avec l’Union soviétique – que Washington estimait peu – pour vaincre Adolf Hitler et ses projets expansionnistes. Les États-Unis partageaient avec l’Europe de nombreuses valeurs, mais Washington s’intéressait au théâtre européen pour lutter contre l’expansion de l’Union soviétique. Il devenait donc nécessaire de créer une brèche entre les États européens et l’Union soviétique.

À cette fin, les USA ont créé le plan Marshall, annoncé en 1947, pour former un front et une coopération américano-européenne dans le but annoncé de remettre sur leurs rails l’économie et des usines européennes. Le plan Marshall prévoyait aussi un pacte de sécurité mutuelle et commune en livrant à l’Europe des armes américaines, en contrant l’influence soviétique en Europe et en réalisant les objectifs nationaux américains.

Avec le déclenchement de la guerre froide après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont connu une croissance économique fulgurante. La guerre a ramené la prospérité et dans la période d’après-guerre, les États-Unis ont consolidé leur position de pays le plus riche du monde.Les USA ont entrepris leur guerre médiatique et de propagande et la course à l’armement et au nucléaire pendant la guerre froide. Cependant, 1991 a marqué la fin de la guerre froide et la désintégration de l’économie soviétique à son niveau économique le plus bas, ce qui a conduit à la Perestroïka. Les plans de domination des États-Unis n’ont pas commencé en 1991, après la chute de l’Union soviétique, comme des chercheurs l’affirment. Ils ne sont pas apparus pendant la guerre froide qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. Ils remontent 

Subscribe to get access

Read more of this content when you subscribe today.

Advertisements
Advertisements
Advertisements